Stains investit la maison du peuple

Le Collectif des mamans à l’initiative des États généraux de l’éducation en 2019 s’est rendu à l’Assemblée nationale pour la projection du film retraçant cette mobilisation inédite. Une soirée riche en émotion et hautement symbolique au cœur du palais Bourbon.

« Je suis fière de toi ! Tu vois jusqu’où nous sommes arrivées ? » Sous les ors de la République, foulant aux pieds la moquette rouge à l’entrée de la salle de projection de l’Assemblée, ce groupe de femmes vit sans doute un moment qui restera gravé. Alors, l’émotion, d’abord retenu, jaillit de toutes parts lors des retrouvailles avec ceux qui ont accompagné ce projet.

Journaliste et réalisateur, Daniel Bouy les connaît bien. Lui, qui fut au cœur des batailles, des tourments et des joies qu’ont connu ces femmes, ces mamans, engagées et dignes. Son film Femmes politiques est sur le point d’être projeté dans ce lieu hautement symbolique. Le message résonne comme une déflagration dans cette atmosphère ouatée. Le tumulte est entré par effraction.

LEUR SENTENCE EST IRRÉVOCABLE

« Nous, habitantes des quartiers populaires, (…) accusons l’État de non-assistance à nos enfants en danger ». C’est par ces mots assénés comme une sentence que débute le documentaire. Puis, la caméra suivra durant près d’une heure les pérégrinations de ces Stanoises à l’initiative des États généraux de l’éducation, en 2019. De répétitions en réunions, d’ateliers philo en conférences de presse, le film retrace le récit d’une mobilisation inédite, une sorte d’épiphanie pour ces femmes qui découvrent alors l’essence même de la politique.

Ce projet « extraordinaire » mêlant les contributions de chercheurs, philosophe, sociologue, psychologue, journaliste, écrivain et metteur en scène a quelque chose d’assez unique en son genre. Nés en 2017 à Montpellier, ces États généraux de l’éducation ont fait le constat d’une rupture d’égalité entre les territoires. S’agissant des enseignants non-remplacés, du manque d’AESH, de moyens humains et financiers, l’école, bien souvent, est vue comme « le lieu de la reproduction des inégalités ».

Pour ces « mamans fréquentant le centre social Yamina-Setti », et dont le sel de la lutte est et sera toujours d’offrir un avenir, le meilleur possible, à leurs progénitures, cette expérience, ces rencontres et cette poignante proposition théâtrale, point d’orgue de leur aventure collective, sont la plus belle des réponses contre la morosité actuelle.


« MOBILISONS-NOUS !»

Invité à participer à un échange à l’issue de la projection, le Collectif des mamans, rompu à l’exercice, a réagi aux observations de la salle. Qualifiant l’objet « d’inspirant », « d’encourageant », qui « donne envie d’agir », de nombreux spectateurs ont souhaité savoir si une suite était dans les cartons. « Partout où nous sommes invités pour projeter le film, on nous pose la question. J’ai envie de répondre que la suite appartient à chacun de nous. Ce travail est le fruit de belles rencontres. Que l’on habite Stains, La Courneuve, Le Blanc-Mesnil, le seul mot d’ordre c’est : Mobilisons-nous ! »

Après les discours d’usage des quelques huiles de passages, les « mamans de Stains » ont été conviées à poser dans les jardins de la Maison du peuple pour une photo souvenir. Et l’une d’elles de nous révéler les coulisses de cette soirée hors norme. « Nous avions été invitées à Montpellier pour participer avec un autre collectif aux Assises régionales de l’éducation et je leur ai dit : la prochaine fois, nous irons à l’Assemblée… Et nous y sommes ! C’est l’aboutissement d’un rêve ».

• M.B.

© Dragan Lekic
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